Nous l’avions déjà évoqué lors d’un précédent article, l’évolution du numérique et des réseaux sociaux n’en finit plus de bouleverser l’industrie musicale. Entre les start-ups qui ne cessent de se créer, le Métavers et les plateformes de streaming, comment l’industrie de la musique évolue-t-elle ?
Les NFT révolutionnent l’industrie musicale
Certains les considèrent comme l’avenir de la profession, tandis que d’autres les perçoivent de menaces pour les artistes. Les NFT bousculent et chamboulent le secteur musical depuis leur apparition. En achetant des NFT, les amateurs de cryptomonnaies peuvent désormais participer à la dissolution d’un écosystème obsolète qui peine à répondre aux besoins actuels des artistes et créateurs. Les NFT, ou « non-fongible-token », sont un concept en vogue qui offre une valeur unique et authentique aux objets non-fongibles qui ne peuvent être copiés.
Youssef El Aouam, jeune entrepreneur dans l’industrie musicale, se lance dans un nouveau défi avec le projet Aloha Metalive. Une approche disruptive du secteur qui se définit comme une action de support aux artistes et créateurs et une opportunité d’investissement pour la communauté. Aloha Metalive offre une plateforme de live shows dans lesquels des artistes interprètent leurs titres à succès dans un cadre acoustique, soutenus par un mélange diversifié de musiciens qualifiés. Elle est unique, puisqu’il s’agit de la première plateforme de live performance 3.0 soutenant l’usage des NFT musicaux.
En matière de consommation musicale, l’introduction de ce modèle NFT est assez novatrice, car elle assure une contribution financière, l’accès à une communauté exclusive et une immersion dans la vie des artistes. De plus, les membres du club Aloha Metalive ont accès à certains privilèges tels que des showcases, des sessions en studio, ou encore des excursions dans des résidences musicales au sein de pays exotiques, leur assurant un réseau durable et des revenus stables.
Le concept Aloha Metalive cherche à renforcer les liens entre les artistes et leurs communautés, contribuant à développer un nouveau business-modèle avec moins d’intermédiations. Une concurrence directe et non des moindres pour les géants du secteur musical.
Ci-dessus, Youssef El Aouam, le fondateur de Aloha Metalive

De nouvelles start-ups fleurissent
Tout comme Youssef, Anes Boukadoum, YouTubeur chanteur aux 500 000 abonnés, a tout plaqué pour fonder Meteora, une start-up innovante aux multiples promesses en faveur des artistes : propriété totale des masters, choix du modèle de rémunération, recours à l’intelligence artificielle pour un marketing impartial, modèle d’abonnements, production et distribution de NFT.
Concernant les auditeurs, la start-up assure une écoute musicale de haute qualité, des recommandations dictées par une I.A. selon les pratiques audio, la possibilité de posséder, vendre et échanger des NFT de ses artistes préférés, ainsi que des interactions dans un Métavers musical.
Enfin, pour les professionnels du secteur, Meteora s’engage sur de nombreux points : création de labels, développement de réseaux pour les artistes, gestion des droits, et même une marketplace.
Exit les Spotify, Deezer, Rarible et autres Opensea… Meteora prétend être l’outil unique qui va enfin apporter des solutions techniques aux artistes, aux auditeurs et aux professionnels.
Ci-dessus, Anes Boukadoum, le fondateur de Meteora :

STAGE, autre exemple de support musical novateur qui a pour mission de révolutionner le secteur en promettant de supprimer les intermédiaires dans la carrière des artistes. Contrairement aux applications musicales classiques, STAGE propose une plateforme tout-en-un aux artistes et aux fans. Son concept, à la croisée de The Voice et TikTok, offre des récompenses sous forme de NFT et des outils permettant de partager le succès de l’artiste.
L’équipe fondatrice du projet, encore secrète pour le moment, compte des experts de l’industrie technologique et musicale, dont un cadre supérieur d’une importante bourse crypto, un spécialiste en intelligence artificielle, un chef de produit reconnu, ainsi que des conseillers anciennement sous label connus pour avoir produit certains grands noms de la musique.
STAGE offrira aux artistes d’un même genre une plateforme égale pour se mesurer et se faire reconnaître. Dans le monde de la musique, où la concurrence loyale semble plutôt rare, STAGE vise à changer la donne. Les artistes auront l’occasion de concourir et les fans âgés de 15 à 25 ans voteront pour leurs chanteurs/musiciens préférés, permettant ainsi aux artistes d’être reconnus uniquement pour leur talent.
STAGE prévoit également de déployer sa plateforme NFT et des jetons nommés Artist. La marketplace comprendra un forum permettant aux artistes d’exposer leur art et aux fans d’acheter leurs NFT.

Le Métavers, l’avenir de la musique ?
Pour Spotify, le Métavers est le futur de la musique. Le géant du streaming musical vient de lancer son propre monde virtuel sur Roblox, l’une des plateformes de création de jeux les plus utilisées. Répartis sur plusieurs îles, les joueurs pourront interagir avec les avatars de leurs artistes préférés et accéder à du contenu inédit, dans le but d’accomplir des quêtes et débloquer des produits dérivés virtuels utilisables sur toute la plateforme. Avec Spotify Island, le groupe suédois donne un avant-goût de ce qui attend les amateurs de musique dans un futur proche. Il marche ainsi dans les pas de l’éditeur américain Epic Games qui, en avril 2020, a réussi l’exploit d’attirer des millions de joueurs sur Fortnite pour assister à un concert inédit (et entièrement virtuel) de Travis Scott. Au total, 27,7 millions de spectateurs se sont connectés au jeu vidéo en ligne pour découvrir le show monumental du rappeur américain.
Spotify n’est pas le seul acteur de l’industrie musicale à vouloir investir le terrain du Métavers. Warner Music Group a acheté une parcelle numérique sur la plateforme The Sandbox pour y construire une propriété faisant office de parc d’attractions musical et de salle de concert.
De son côté, Universal Music Group ambitionne de faire son entrée dans les mondes virtuels, à travers un groupe de musique composé de trois singes virtuels de la collection Bored Ape Yacht Club et d’un autre primate de la collection Mutant Ape Yacht Club, avec Kingship. Chacun est assigné d’une personnalité et d’une histoire qui lui est propre. Il est prévu que cette formation puisse se produire lors de concerts virtuels, mais aussi s’infiltrer dans de futurs jeux vidéo sur des plateformes en ligne.
Même si le Métavers n’en est encore qu’à ses débuts, cette doublure numérique du monde physique a le potentiel de devenir un véritable eldorado pour les acteurs de la musique. Ils espèrent tous capitaliser sur les nouvelles sources de revenus que laisse présager le développement de cet univers virtuel. Pour Universal Music Group, l’idée est de gagner de l’argent en vendant des NFT liés aux activités de Kingship comme des inédits, des billets pour accéder à des événements exclusifs ou des produits dérivés virtuels. Spotify espère en faire autant avec ses îles sur Roblox.

Les réseaux sociaux et plateformes musicales séduisent de plus en plus
Plusieurs plateformes ont récemment développé, par leurs algorithmes, des services musicaux destinés à mettre en avant les talents émergents. Un usage qui interroge le fonctionnement de ces nouvelles technologies, ainsi que l’évolution des plateformes et leur rôle dans l’industrie musicale. Le réseau social TikTok a créé SoundOn, un service de promotion d’interprètes encore peu connus, tandis que SoundCloud a annoncé le lancement de son projet d’écurie dédiée aux musiciens de demain.
Spotify a déposé le 1er mars 2022 un brevet relatif à une nouvelle technologie de détection de talents sur sa plateforme. Le but ? Dénicher de jeunes talents avant les majors et signer ainsi avec eux des contrats exclusifs. Chaque jour, plus de 60 000 nouvelles chansons sont chargées sur Spotify, soit un titre par seconde. Grâce à cette masse de datas, repérer les diamants bruts de demain devient un enjeu de taille pour la plateforme de streaming musical. Pour trouver ces artistes encore inconnus, Spotify s’appuie sur deux éléments : son algorithme et sa communauté. La plateforme sait identifier les utilisateurs les plus « pointus », passionnés de musique et dénicheurs de nouveaux talents, appelés « diggers ». L’algorithme analyse les historiques d’écoute de ses diggers et découvre ainsi ces perles cachées. Ce brevet permet donc de concurrencer directement les majors en empiétant sur leur territoire.

Concernant TikTok, produire sa musique et la diffuser par soi-même, telle est la promesse de l’application chinoise avec SoundOn, son nouvel outil de distribution et de marketing musical, disponible depuis le 9 mars 2022 aux Etats-Unis, au Royaume-Uni, en Indonésie et au Brésil. Son but est d’aider de jeunes artistes, encore amateurs, à se lancer dans la musique. Ceux qui s’y inscrivent peuvent distribuer gratuitement leur création sur TikTok ainsi que sur d’autres services de streaming comme Spotify ou Apple Music.
TikTok s’est associé avec Believe, entreprise française spécialisée dans le management d’artistes et de labels indépendants et propriétaire de TuneCore, un service en ligne de distribution, d’édition et de licence de musique numérique. C’est notamment grâce à TuneCore que SoundOn peut distribuer les chansons sur les autres plateformes de streaming. Avec SoundOn, TikTok se voudrait plus vertueuse et promet que « 100 % des royalties récoltées par l’artiste sur la plate-forme lui seront reversées » la première année, « 90 % » à partir de la deuxième ».
Au regard des récentes technologies et acteurs nés avec le numérique, un profond changement de modèle semble se profiler pour l’industrie musicale. Les nouveaux partenariats entre professionnels du secteur et artistes ainsi que les nouvelles démarches en faveur des droits musicaux suffiront-ils à peser face aux dernières innovations toujours plus scrutées par la sphère numérique ?